Conclusions de l’analyse :
Ce travail est une partie non négligeable de la préparation du travail de terrain. L’analyse des projets sociaux et des fichiers adhérents trouve toute son importance dans la recherche que nous menons. Une bonne connaissance du terrain, permet de mieux saisir les enjeux qui peuvent peser sur la structure. Elle nous permet de dégager des pistes de réflexion et de mieux appréhender les caractéristiques des centres sociaux et de la population que nous étudions.
Le travail mené sur les projets sociaux nous permet également de dégager des éléments de questionnement qui semblent être transversaux aux centres, quelque que soit leur catégorie. Tout d’abord nous avons identifié, grâce à l’analyse lexicographique, l’existence d’une rhétorique propre au projet social. Ce dernier nous montre l’importance que peut prendre l’orientation vers les actions enfance -jeunesse-famille au sein des centres. A notre sens, ce parti pris tient au fait que le projet social est destiné à la CAF. Néanmoins, ce constat nous interroge ici, sur la place qui est accordées aux “personnes âgées”, au “Séniors” et au “bien vieillir” dans les projets sociaux. D’autant plus, lorsque, comme nous l’avons montré avec les fichiers adhérents, ils peuvent occuper une place prépondérante dans les structures. Par la lecture des projets sociaux, il se dégage que les centres peuvent se trouver dans 3 positions vis-à-vis de cette question du vieillissement:
- – les centres qui évoquent un “possible” développement d’actions en direction de ce public.
- – les centres qui ont déjà mis en place et élaborés leurs actions,
- – les centres qui ont déjà en eu la possibilité d’identifier des retombées possible par leur diagnostic interne
Ainsi, nous constatons que le développement d’une réflexion et d’une démarche autour de cette question est un processus qui s’inscrit dans le temps. Tous les centres n’en sont pas au même stade d’avancement. La mise en place d’actions spécifiques « Séniors » ou d’axe “bien vieillir” ne semble donc pas naturelle au regard de ce qui est présenté dans le projet social. Néanmoins, les données utilisées pour la constitution de la typologie, issues de l’enquête SENACS montraient que la majorité des centres listent des actions en lien avec ces problématiques quand on leur pose la question. Alors, pourquoi est-ce que cela ne se traduit pas plus dans les projets sociaux ?L’étude des projets sociaux nous a également permis de saisir d’autres enjeux et notamment ceux autour de la construction du diagnostic socio-territorial. Ce diagnostic est un outil de base de la démarche des centres sociaux, et est au cœur de la manière dont ils développent et construisent leurs actions. Ce que nous avons ressorti de leur lecture croisée vient interroger un des aspects centraux de l’enquête ICARE : quels sont les outils et indicateurs à disposition des centres sociaux pour qualifier et évaluer leurs actions? Notre lecture montre que, même si les centres mobilisent des données externes et des méthodes de consultation efficaces et pertinentes, il y a un problème d’adéquation entre la donnée, la population ciblée, le territoire d’action et l’objectif du diagnostic.L’analyse des fichiers adhérents des centres sociaux, c’est-à-dire des données internes que possèdent les structures, confirme ce constat. En effet, au-delà de statistiques d’ensemble que nous procurent ces fichiers adhérents, c’est aussi un indicateur sur les critères de diagnostic que possèdent les centres sociaux. Les difficultés que nous avons rencontrées lors de notre analyse, de par la disparité importante de certaines données nous permet de réinterroger la capacité des centres sociaux à aller chercher l’information. L’étude I- CARE vise à mesurer l’impact des centres sociaux sur un public donné, or si les centres sociaux n’ont que très peu d’informations sur la population qui côtoie leur structure comment peuvent-ils répondre efficacement à leurs besoins et réussir à en mesurer les retombées ?
Des fichiers adhérents complets et organisés de manière homogène auraient pu être source d’informations précieuses. Nous constatons, par exemple, qu’une variable bien renseignée telle que les adresses des adhérents, qui sont présentes pour la quasi-totalité des centres sociaux de notre étude, permet d’approfondir la connaissance que nous pouvons avoir de la structure. En effet, cette donnée permet de révéler qu’il n’y a pas de lien direct entre le nombre d’adhérents et le nombre d’individus présents sur le territoire d’agrément, contrairement à ce que nous aurions pu envisager. Nous apprenons également que les adhésions dépassent systématique le territoire d’agrément du centre social, un constat qui réinterroge des concepts clés comme la “proximité” et la “localité” et plus largement encore le rapport au territoire.
Cependant, le traitement des quelques données disponibles sur les caractéristiques sociales des adhérents et des bénévoles nous permet l’élaboration d’hypothèses de travail et de pistes de réflexion pour les suites du projet I-CARE. Nous avons remarqué que le taux d’adhérents de 60 ans ou plus est très variable d’un centre social à l’autre. Certains centres se qualifient par une population principalement âgée quand d’autres pas du tout. Peut-on trouver des raisons à ce phénomène dans la démographie du territoire, par les activités proposées, … ? Cela nous a également permis de montrer que les plus de 60 ans dans les centres sociaux sont principalement de jeunes retraité. De plus, les 60 ans et plus semblent représenter une partie non négligeable des bénévoles. Un bénévolat qui ne laisse pas indifférent les hommes qui pourtant sont moins présents que les femmes dans la structure.
Ces analyses, résultats et hypothèses restent formulés à un stade exploratoire de la recherche. Il convient maintenant d’aller les confronter à des situations et des éléments issus du travail de terrain afin de les confirmer, infirmer et/ou de les enrichir.
Shani GALAND – Doctorante en sociologie au laboratoire CENS – chargée de mission I-CARE pour l’Union Régionale des centres sociaux des Pays de la Loire.
Juliette Michel – Doctorante en géographie au laboratoire ESO – chargée de mission I-CARE pour l’Union Régionale des centres sociaux des Pays de la Loire